Les résidents de Port Colborne ont exploré, le mercredi 22 novembre, les méandres de l’histoire locale avec la conférencière Danièle Caloz, sur le thème Jean-Baptiste Rousseaux, une histoire du Niagara.
Invitée par le Centre des aînés francophones de Port Colborne, la cofondatrice de la Société d’histoire de Toronto a retracé dans la salle Brébeuf, testament, illustrations et documents officiels à l’appui, le parcours de celui que les Britanniques nommaient St-John.
Ce Canadien-français, natif de Sault-au-Récollet en Nouvelle-France en 1758, fut le premier Européen à s’installer dans la région de Toronto avec son père Jean-Bonaventure, au XVIIIe siècle. Le commerce de fourrure avec les Premières Nations a permis aux deux hommes de se rendre indispensables en tant qu’interprètes au service des Français durant la Guerre de sept ans, puis des Britanniques, après la défaite.
« Être interprète à cette époque signifiait être employé au département des Affaires indiennes par de puissants surintendants qui dirigeaient tout, relate Mme Caloz. Cela consistait à passer beaucoup de temps auprès des Autochtones et à les inciter à faire la paix tout en restant neutre entre eux et les Britanniques. C’était aussi l’opportunité d’obtenir un permis exclusif pour la traite des fourrures aux meilleurs endroits. »
Jean-Bonaventure obtient un permis en en 1720, dans le Haut-Canada, sur la rivière Toronto (à St-John Creek, qui lui vaudra le sobriquet de St-Jean) – actuelle rivière Humber – pour s’adonner à ce lucratif commerce qu’il transmet à son fils, tout aussi polyglotte et fin connaisseur des territoires mississaugas et iroquois.
Connu comme le deuxième Saint-Jean, Jean-Baptiste Rousseaux reprend l’affaire familiale et entre à son tour au département des Affaires indiennes en 1775, alors qu’éclate la guerre d’indépendance des États-Unis. Il joue alors un rôle crucial dans les alliances anglo-indiennes, guidant les troupes autochtones contre les révolutionnaires américains et épousant la fille du chef mohawk John Brant, un jeune guerrier qui deviendra leader des Six Nations.
Danièle Caloz a livré des anecdotes peu connues, notamment issues des recherches de la Société d’Histoire de Toronto, brossant le portrait d’un marchand avisé dont le commerce florissant avec Autochtones et les Loyalistes a fait de lui un personnage incontournable aux yeux des Anglais, mais aussi dont il faut se méfier, alors que se profile la guerre d’indépendance américaine.
Le colonel Simcoe, fondateur en 1791 de la ville de York (qui deviendra Toronto en 1834) l’a bien compris, le sollicitant comme interprète personnel et guide dans son expédition pour ouvrir une voie plus sûre le long de la rivière Niagara, la Portage Road.
S’installant en 1795 dans le canton d’Ancaster (actuel port de Hamilton), où « il possède un hôtel, une distillerie, deux moulins, un magasin général », détaille la conférencière, Rousseaux continue de servir la Couronne. Il le fera jusqu’à sa mort en 1812 au Fort George (Niagara-on-the-Lake) dans la première année du conflit anglo-américain.
« Ce catholique devenu protestant, est resté fidèle à lui-même tout en s’adaptant aux bouleversements d’une époque trouble », a conclu Danièle Caloz, livrant à son public des aspects méconnus de l’histoire de la Péninsule comme le rôle d’observatoire qu’ont joué les collines de Port Colborne dans la guerre.
Cette conférence est la première d’une série de trois rendez-vous annuels que le Centre des aînés de Port Colborne veut mettre en place sur des thèmes qui captivent la communauté qui définira elle-même ce qu’elle aimerait.